Pas de grève dure des sages-femmes sans service minimum


01/04/2022

Angélique EYRIGNOUX commente les deux ordonnances récemment rendues par le Tribunal administratif de Rennes opposant des sages femmes à la préfecture du Finistère. 

Voilà ce qu’a jugé le tribunal administratif de Rennes par deux ordonnances consécutives des 7 et 13 janvier 2022, opposant des sages femmes à la préfecture du Finistère. Précisément, un préavis de grève dure avait été déposé le 29 décembre 2021 auprès d’une maternité de niveau II, pour une durée illimitée, à compter du 3 janvier 2022, présentant le risque d’une mise à l’arrêt total du service. Le préfet est intervenu pour réquisitionner les sage-femmes, une première fois par une décision du 3 janvier 2022 et une seconde fois par une décision du 10 janvier 2022. C’est dans le contexte de ce mouvement social difficile que le tribunal administratif de RENNES a été saisi pour statuer sur le nécessaire service minimum des sages femmes du secteur privé.

I - Le droit de grève est une liberté fondamentale qui connaît des limites

Si le droit de grève est une liberté fondamentale reconnue comme telle, elle est aussi une liberté limitée ainsi que le préambule de la Constitution de 1946 le prévoit en indiquant que « le droit de grève s’exerce dans le cadre des lois qui le règlementent ». Cette limite légale a été validée par le Conseil Constitutionnel. Elle est également reconnue par le Conseil d’Etat

Par l’article L. 2215-1-4° du code général des collectivités territoriale, le législateur habilite le préfet, en cas d’urgence, à adopter une mesure de réquisition à l’encontre de salariés de droit privé ou agents de droit public en situation de grève dans un établissement de santé. C’est ce qu’a été contraint de faire le préfet du Finistère dans ces deux dossiers.

Cependant, dès l’adoption des décisions, des sage-femmes ont saisi dans le juge d’un référé liberté afin de tenter de contrer ces mesures. En pareilles circonstances, lorsqu’une liberté fondamentale est en cause, c’est le juge des référés du tribunal administratif qui est compétent pour statuer en urgence dans un délai de 48 heures, en application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative. 

II - Le juge du référé liberté saisi d’une réquisition préfectorale dispose de 48 heures pour en contrôler la proportionnalité

La réquisition préfectorale est régulière si elle intervient, d’une part, pour assurer le maintien d’un effectif suffisant pour garantir la sécurité des patients et d’autre part, en l’absence de redéploiement possible des patients vers un autre établissement du même secteur géographique. Ces deux conditions cumulatives ont été dégagées par le Conseil d’Etat dans une décision du 9 décembre 2003 qui concernait précisément une maternité.

Elles ont été examinées par le juge des référés du tribunal administratif de Rennes les 7 et 13 janvier dernier. 

Rappelant ce principe, l’examen du juge a porté sur l’effectif suffisant et le redéploiement géographique.

III - Le juge contrôle si la réquisition permet de maintenir un effectif suffisant pour garantir la sécurité des patients

Réquisitionner l’essentiel de l’effectif du personnel gréviste est possible et régulier si la réquisition permet d’assurer un effectif suffisant pour garantir le service minimum. L’effectif suffisant correspondant à l’effectif indispensable pour assurer la continuité du service et donc le service minimum et ce, même s’il correspond (dans certains cas) à la totalité de l’effectif de l’établissement.

La suite de l'article d'Angélique EYRIGNOUX à retrouver dans Le Monde du droit.